En 1983, Barry Slauenwhite a quitté le pastorat pour rejoindre Compassion Canada, un ministère mondial œuvrant à l'étranger, aux côtés d'autres églises, pour sortir les enfants de la pauvreté. Dix ans plus tard, il en est devenu le président-directeur général, poste qu'il occupe maintenant depuis 25 ans et dont il prendra sa retraite en octobre prochain.
C’est au cours d’une rencontre avec la directrice nationale de Compassion Mexico que Slauenwhite comprit la direction qu’il allait prendre avec son ministère. Cette femme l’a incité à regarder les pauvres comme Dieu les voit.
« Elle a pointé son doigt tout près de mon visage », se souvient-il « et elle m’a dit : 'Ne renonce jamais à la vision que Dieu a enfouie au plus profond de ton cœur ». Elle m'a ensuite expliqué qu’en percevant uniquement les pauvres comme manquant de biens matériels, notre approche pour leur venir en aide ne peut pas être efficace. Nous passons à côté de la véritable cause de la pauvreté : une relation brisée et fracturée avec notre Créateur. »
En réponse, Slauenwhite lui a fait une promesse : la mission de Compassion serait, grâce au pouvoir unique de Jésus-Christ, de restaurer la relation entre l’humanité et Dieu. « C'était comme si j’étais sorti de mon corps et que je me trouvais en présence de Dieu. Je me souviens lui avoir dit, comme en face de Dieu lui-même : « Vous pouvez compter sur moi. Je n’abandonnerai jamais le Christ. » Voilà pourquoi, pendant 35 ans, telle a été ma mission : veiller à ce que le Christ soit la pierre angulaire de toutes les actions mises en place pour aider les pauvres. »
On ne peut nier les progrès accomplis par les organismes humanitaires depuis les années 90 dans la quête de leur objectif commun : mettre fin à la grande pauvreté mondiale d'ici 2030. Mais, ces dernières années, ces avancées ont considérablement ralenti, la faute à la guerre en Syrie et à la surpopulation en Afrique subsaharienne.
« Au cours des 25 dernières années, plus d’un milliard de personnes sont sorties de la pauvreté, avec le taux mondial actuel le plus bas de toute l’Histoire. C'est l'un des plus grands accomplissements de notre époque », a déclaré Jim Yong Kim, président du Groupe de la Banque mondiale, au journal The Guardian en septembre dernier.
« Mais si nous voulons vaincre la pauvreté d’ici 2030, nous devons nous investir bien davantage, en particulier dans l’accroissement du capital humain. C’est ce qui nous permettra de favoriser la croissance inclusive et d’aider les populations plus touchées à sortir de la grande pauvreté. Pour eux, nous n’avons pas le droit d’échouer. »
Pourtant, comme l’explique Slauenwhite dans son nouveau livre, Strategic Compassion (la Compassion Stratégique), les ressources investies dans la lutte contre la pauvreté ne traitent en réalité que ses symptômes. Elles ne visent ni ne s'attaquent à sa cause fondamentale. C’est bien la malédiction de la nature humaine.
« Nourrir les personnes qui ont faim est une action louable. Nous ne pouvons pas nous détourner de ceux qui ont faim », dit-il. « Mais si nous soignons les malades, si nous éduquons les illettrés et les non instruits, si nous faisons toutes ces choses bonnes et admirables, sans ajouter Jésus à l'équation, alors nous ne traitons pas le problème de fond, sa cause profonde. C’est pourtant ça qui mettra définitivement fin à la pauvreté. »
Lorsque nous acceptons de croire en la bienveillance de la parole de Jésus, nous recevons un don qu’aucune aide étrangère ne pourra nous apporter : l’espoir. « L’espoir, dit Slauenwhite, est un cadeau puissant et déterminant. On constate que les mêmes personnes, confrontées au même manque de ressources, font pourtant des choix différents et influencent leur environnement. J’y crois de tout mon coeur. Je n'ai jamais vu un organisme développer une communauté, mais j'ai vu des individus développer et changer leur communauté. »
Dans son livre, il ajoute: « Je suis tout à fait convaincu que l'Évangile est la clé qui libérera les enfants et leurs familles des chaînes de la pauvreté ».
Slauenwhite n'est pas le seul à faire ce constat. Sur dix individus parmi les plus pauvres du monde, c’est-à-dire vivant avec moins de cent dollars par personne et par an, huit habitent dans la fenêtre dite 10/40, une région d'Afrique du Nord, du Moyen-Orient et d'Asie située entre le 10e et le 40e parallèle de l'hémisphère Nord. C'est également dans cette région que se trouve la majorité de la population mondiale qui n'a pas encore été exposée à l'Évangile. Comme le remarque le Joshua Project, ministère auprès des peuples non atteints, « il existe un recoupement indéniable entre les pays les plus pauvres et ceux qui sont le moins évangélisés ».
En d’autres termes, proclamer l’Évangile et le mettre en pratique par des actes de compassion constituent les deux faces d’une même pièce.
« La Bible nous enseigne que nous devons aller prêcher l'Évangile à travers le monde, c’est la proclamation de la parole de Dieu. Mais la Bible démontre également que prêcher est bien plus que la simple parole. Si nous ne mettons pas l’Évangile en pratique, notre prédication reste vaine », note Slauenwhite.
« Jésus appréhende les individus de façon holistique et nous devrions l’imiter. Il les considère comme des entités spirituelles, physiques, sociales et économiques, comme des êtres complets. Pourquoi les a-t-Il nourris ? Parce qu’ils avaient faim et qu’Il les aimait. Mais Jésus n'est pas venu sur terre pour mettre en place un programme d'alimentation. La donnée la plus importante de l’équation, c’est l'Évangile. Mais l'Évangile n’est pas une fin en soi ».
Pour les croyants, cette vision holistique signifie rechercher une relation juste et saine, avec Dieu, mais également avec les autres.
« Il est de ma responsabilité d’établir une relation positive avec mon prochain, que ce soit avec mon collègue de travail ou avec mon voisin. Cela inclut également les plus démunis en Afrique, en Haïti ou ailleurs », déclare Slauenwhite. « En tant que chrétiens, nous nous sommes tellement concentrés sur notre relation verticale avec Dieu que nous en avons oublié les relations horizontales avec les autres, c’est-à-dire la façon dont nous traitons ceux qui nous entourent. En travaillant aux côtés des pauvres, je veux m'assurer que les gens que j’ai pour mission d’aider sont également pris en compte ».
Ainsi, les Canadiens qui souhaitent, à l’exemple de Slauenwhite, eux aussi soutenir des hommes et des femmes démunis doivent faire preuve d’un véritable discernement. « Réfléchissons à une stratégie, menons les bonnes actions », dit-il. « Je mets au défi chaque homme, s’il est fidèle au Christ, de faire des dons pour financer des activités évangéliques. Ne gaspillez pas vos ressources en investissant dans des organismes humanitaires. Laissons cela aux non-chrétiens. Beaucoup d’argent est déjà engagé dans ces missions. Nous devons être stratégiques, financer le ministère et les activités qui auront un réel impact sur le Royaume de Dieu ».
Pour écouter cet entretien dans son intégralité en anglais, rendez-vous sur le site de Promise Keepers Canada.
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Pour acheter le livre, Strategic Compassion, rendez-vous sur le site de Promise Keepers Canada.
Frank Stirk vit à North Vancouver. Il est l’auteur de Streams in the Negev: Stories of How God is Starting to Redeem Vancouver (Urban Loft)